Ambre
De l'art de chercher parfois l'inspiration

Écrire régulièrement, dans le cadre d’articles, de chroniques est un exercice parfois compliqué. Il faut des idées et une régularité qui doit parfois s’affranchir de l’inspiration. Qu’importe qu’on ait “envie” d’écrire ou pas, qu’importe si on est inspiré aujourd’hui il faut préparer sa chronique pour X, et terminer son article pour Y...et je ne parle même pas de l’envie personnelle d’écrire plus sur ce blog par exemple, ou de développer d’autres projets.
Il arrive parfois d’écrire quatre chroniques d’un coup, facilement pour avoir de l’avance. Il arrive à contrario d’être à flux tendu et de les envoyer au dernier moment, en trouvant un sujet en dernière minute. Il arrive d’être transcendé.e par certains sujets, d’aimer les écrire et les partager, il arrive aussi d’avoir du mal à trouver des idées et écrire bon an mal an, quelque chose qui tienne la route. Il arrive d'être fatigué.e de sa journée de travail, et de ne pas avoir l’énergie de replonger son nez derrière un ordinateur sur son temps libre. Il arrive que des articles qu’on pensait “simple” prennent pourtant beaucoup de temps et de recherches. Que d’autres au contraire, s’écrivent en moins d’une heure.
Il arrive que des articles pourtant “bateau” fassent beaucoup de clics et de partages sur la page de Courrier International. Il arrive aussi que d’autres qui me tiennent particulièrement à coeur, qui me rendent fière, ne marchent pas tant et reste sur l’autel du “j’aurais pensé que pourtant…”. Il y a nécessairement une dichotomie entre notre façon de voir et ressentir les sujets et ce qui peut susciter l'intérêt de “Madame-Monsieur tout-le-monde”, ou du moins des réseaux sociaux. Lorsqu’on écrit pour “d’autres”, on écrit en dehors de son cercle social et intellectuel : ce sont alors d’autres codes et goûts qui règnent. Et aujourd’hui, le succès, la crédibilité de l’auteur se compte souvent en like et en partage, qu’importe ce que l’article contient. Il est arrivé que des articles écrits sous le feu de l'idée en trente minutes à peine soient énormément relayés (notamment celui sur la Question de revenir vivre en Calédonie) et que d'autres qui aient demandés du temps et de l'effort de rédaction soient en revanche mis de côtés.
J’ai un dossier “écriture 2018-2020” sur mon ordinateur. Il y a des choses publiées (ici, sur DM, sur Courrier, autres-parts encore), des brouillons pour plus tard, d’autres choses écrites qui ne verront jamais le jour. Des projets aussi, avec des bouts de page, des bouts de “plan” de ce que ça pourrait être si je décidais d’en faire “vraiment” quelque chose. Des synopsis, des profils de personnage, des idées de chronique, des listes de magazine à contacter, j’en passe encore. Des dossiers qui portent en eux plein d’heures de travail, des bouts de fierté, d’espoir, et parfois de déception aussi, ou d’apprentissage. Ecrire pour deux ou trois ou éditeurs, magazines, journaux différents, ce n’est pas grand chose. Mais écrire en parallèle d’un travail à temps plein prenant, et d’une vie riche et bien remplie, c’est un challenge de temps, d’organisation et de pro-activité.
On peut avoir un peu de “talent” ou de la ”facilité” pour écrire, comme pour peindre, dessiner, jouer de la musique, pratiquer un sport. Mais avoir un peu de “talent” ne vaut pas grand chose si on ne le travaille pas, si on ne le “technicise” pas. Dans l’écriture contemporaine, il y a les quelques noms d’auteurs à succès, de grand reporters, de chroniqueurs, pour tout un tas d’autres aussi qui galèrent au quotidien. Il y a des “nobody” peut être très talentueux qui envoient des romans qui restent sans réponse même aux plus
petites maison d’édition, et il y a des instagrameurs ou pseudo-star qui sortent un livre venu de nul part dans de grandes maisons d’édition. Lorsqu’on veut vivre du fait d’écrire, encore faut-il publier du contenu qui se vend bien, ou à défaut être quelqu’un-qui-se-vend-bien tout court.
Lorsqu’on pratique passionnément quelque chose (artistique, entrepreneurial) au point de vouloir “aller plus loin” (en vivre, développer cette activité/talent) il arrive d’atteindre la limite de ce qu’on peut cumuler avec un travail à temps plein, une vie sociale et amoureuse, d’autres activités éventuelles (sportives par exemple) et un nombre d'heures de sommeil décent. On atteint ce cercle vicieux où on ne peut plus rien entreprendre de nouveau par manque de temps (il faut déjà honorer décemment les engagements en cours) tout en ayant besoin de temps pour développer ce qu’on aimerait. Je n’ai pas la réponse à cette question, si ce n’est qu’elle implique de faire des choix, et choisir, c’est renoncer : dans ce cas, à développer une passion, ou gagner un revenu fixe et confortable, ou encore “une vie” (des heures de sommeil, une vie sociale…) que sais-je. On dit toujours que pour que ça marche, il faut du travail, du talent, ou de la chance, et qu’il suffit d’avoir deux de ces choses pour réussir. On verra bien ce que l’avenir nous réserve.